Echos lointains (pour Meleth)

(je poste ça ici car ça concerne le rp entre Mordrahan et Meleth)

Minuit sonnait au loin quand Mordrahan déposa la dague que lui avait confiée Meleth sur son bureau. Il resta debout devant la table, considérant l’objet avec une expression qui mêlait envie et méfiance.
Il était épuisé, et en même temps son corps brûlait d’une fièvre qu’il pensait avoir oubliée. Combattre l’essence du dragon avait réveillé en lui le sombre appel du Jahad. Cela avait commencé dans les méandres du Temps, quand les Infinis avaient utilisé sa seule faiblesse. Il aurait dû savoir que revenir dans le passé l’exposait à leur influence. Et cela n’avait fait que s’amplifier sous le pouvoir de la Lune Rouge, à Reflet de Lune. Et maintenant la faim le rongeait…
Il avait voulu protéger Meleth, mais il ne faisait que l’exposer à un danger plus grand encore. Lui-même.
Il serra les poings avec fureur.
« Tu te fais du mal pour rien, mon frère »
La voix glaciale de Sokhar résonna dans la pièce. Le Chevalier de la Mort se tenait dans l’encadrement de la porte, revêtu comme toujours de son armure massive, son épée runique à la main.
Mordrahan se retourna lentement. La main de son jumeau se tendit vers la dague ouvragée.
« Ce n’est pas cela qu’il te faut et tu le sais parfaitement. »
Le sorcier fronça les sourcils, et la sphère de lumière embrasée qui flottait près de son épaule palpita comme un cœur qui s’emballe. Sans répondre, il se dirigea vers le lourd coffre renforcé de fer qui occupait un angle de la pièce, et l’ouvrit. Puis il prit la dague, l’enveloppa dans un morceau de soie et la déposa à l’intérieur.
Sokhar s’approcha, observant le contenu du coffre avec intérêt.
Son regard couleur de givre suivit celui de son frère. Les yeux de Mordrahan avaient repris une teinte violet foncé, et il fixait la boîte plate au couvercle ornementé qui reposait près de la dague de la Magistrice.
Le Chevalier de la Mort émit un rire rauque.
« Ce temps-là est passé, mon frère… Tu as résisté à l’appel de la Fille d’Elune, mais tu ne calmeras pas le Rouge avec tes petits jeux… »
Mordrahan rabattit le couvercle du coffre d’un geste sec, et fit face à son jumeau. Son expression était impénétrable, ses yeux couleur d’abyme. Il leva la main, et la sphère de flamme vint s’y loger, devenant d’une couleur rouge profond avant de disparaître, absorbée par le corps du sorcier. Il hocha lentement la tête.
« Le Noir sera toujours là et nous le savons tous les deux… Mais pour dompter le Rouge il suffit de lui donner ce qu’il veut… du sang et des âmes… »
Mordrahan sourit froidement, désignant l’épée runique qui scintillait dans la main de son frère.
« Je te laisse le sang… »
Sans un mot de plus, il se détourna et quitta la pièce.

Dans ses quartiers, Melëth fixait l'étagère prés de la fenêtre. Les rayons de lune passant à travers le fin rideau bleu se posaient sur l'insigne poussiéreux de la Main d'Argent posé à côté d'un collier elfe en argent posé délicatement dans un petit écrin ouvert. Les autres étagères étaient remplies de divers objets portant le sceau des Esthar qu'elle avait pu ramener du manoir. Le regard de la Magistrice glissa sur un petit portrait de famille représentant Grâce et Vincent Esthar avec leurs trois enfants. Prés du père l'aîné, Derik, portait fièrement l'armure des disciples d'Uther. L'epée qu'il portait alors dans son dos était à présent posée à côté de l'armoire de sa nièce, ici même, dans un coin de la pièce. Elle portait encore le sang de son ancien propriétaire.

Melëth sourit en coin. Des mois durant elle avait culpabilisé pour ce geste, pensant qu'elle avait tué le dernier Esthar aprés elle. Mais finalement les choses s'étaient avérées bien plus compliquées. Et puis il y avait encore cette enigme.

Ses yeux noirs se posèrent sur un masque en argent fendu en deux morceaux semblable au sien prés du portrait de son ancien maître, Eledrin Niel'Owyn Leh'Vestal. Il y avait aussi quelques minusculles fragments d'anneau et de la poussière bleue dans une fiole, une boîte d'aiguilles, diverses armes et une robe de cérémonie était accrochée au mur juste à côté avec son uniforme noir.

"Je ne sais toujours pas comment tout cela est arrivé. J'ai peur d'avoir été la cause de cette tragédie...Maître pourrez-vous un jour me pardonner ?"

Le porte dans son dos grinça. Un félin noir en sortit avant de reprendre une forme Kaldorei. Les yeux blanc verdâtre dissimulés derrière ses boucles mauves.

"Melëth... tu te fais du mal avec ça. Autant oublier. Tu as une vie ici à présent."

Melëth détacha ses yeux de l'étagère pour fixer ceux de la kaldorei. Elëth la fixait aussi. C'était presque comme un miroir. L'ancienne Rikka Niel'Owyn avait toujours son oeil gauche dissimulé sous son masque, la longue cicatrice blanche apparaîssait au niveau de son nez. Mais son visage était identique à celui de Melëth, bien qu'une seule des deux était kaldorei à part entière.

"Par où es-tu entrée ici ?"
"J'ai tout simplement ouvert la porte et suivi ton odeur. Je me susi installée ici en t'attendant et je viens de me réveiller, la route a été longue."
"Où étais-tu tout ce temps ?"
"J'ai mené mon enquête aussi... mais j'ai déjà assez de mal avec ce nouveau corps, mes souvenirs se troublent et peu d'éléments me sont revenus sur cette nuit-là."

Melëth reporta son attention sur le masque fendu. Les images de cette fameuse nuit la hantaient toujours, jusqu'au sommet de sa tour elle y pensait encore. Elëth suivit son regard. Elle savait elle aussi que ce n'était pas prêt de se terminer. Plus de cinquante Vestals avaient été assassinés, ainsi que leurs enfants. Un massacre ignoble dont seule melëth était sortie vivante, et Elëth par le sacrifice d'un maître dont le masque gisait à présent sur une étagère.

"Tout cela est loin d'être terminé Melëth... je crois que l'ennemi n'a pas eu ce qu'il voulait la dernière fois, et qu'il reviendra le chercher."

La semi elfe porta son regard sur son tabard plié et posé sur son lit.

"Je resterai ici quoi qu'il arrive Elëth. Le passé est le passé et je resterai fidèle à l'Ordre même s'il me rattrappe."

Elëth ne trouva rien à dire. Aprés avoir repris une forme féline elle s'allongea au pied du lit. Il n'y avait rien à ajouter à présent. Il n'y avait plus qu'à attendre... dans l'espoir que l'ennemi ne les retrouve jamais.